Exposition Luc Tuymans au Bozar de Bruxelles

Une exposition présentée au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (BoZar), Belgique (18 février - 8 mai 2011)

Published on Friday 25 March 2011



Après une grande tournée aux Etats-Unis en 2009 et 2010, l'exposition Retrospective, présentant l'oeuvre de l'artiste belge Luc Tuymans, ne fera qu'un seul arrêt en Europe : au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles.


Luc Tuymans (né en 1958)The Nose, 2002; oil on canvas, (c) Collection of Jill and Dennis Roach, © Luc Tuymans
Luc Tuymans (né en 1958)
Luc Tuymans est l'un des artistes les plus influents de notre époque. Pour beaucoup, son style figuratif, à la fois fascinant et complexe, a contribué au renouveau pictural des années 1990.

Cette rétrospective comprend 70 oeuvres (datant de 1978 à 2008), à travers lesquelles est reconstruit le cheminement singulier de l'artiste, mettant en évidence la façon dont il passe d'une oeuvre à l'autre.

Le parcours recrée les installations originales de trois séries : At Random, Der Architekt et Mwana Kitoko : Beautiful White Man. L'exposition comprend également des oeuvres provenant des séries Proper et Der diagnostische Blick.

Ses peintures apparaissent à première vue comme des scènes relativement banales de la vie de tous les jours. Mais derrière ses intérieurs, paysages ou personnages aux allures plutôt innocentes, se cache presque toujours une autre signification. Les idées et évènements présents dans l'oeuvre de Tuymans sont rarement explicites, mais plutôt suggérés par des allusions subtiles. Comme autant de souvenirs voilés, ces oeuvres oscillent sans cesse entre cohérence et illisibilité, poussant ainsi le spectateur à remettre en question non seulement ce qu'il voit, mais aussi sa façon de regarder.

Le parcours, construit chronologiquement, parcourt une période allant de 1978 à 2008.
Dans sa série At Random, Tuymans questionne les mécanismes de la perception et la labilité de l'appréhension visuelle. Dans ces tableaux, les formes et contours émergent lentement d'un décor flou. Le titre de l'oeuvre aide parfois à attirer l'attention sur un objet reconnaissable. C'est notamment le cas dans The Doll (1994) qui, de prime abord, n'est autre qu'un paysage nordique plongé dans la brume. Ce n'est qu'après avoir lu le titre et s'être attardé devant la toile que le spectateur découvre qu'il y a plus.

Luc Tuymans (né en 1958)Mwana Kitoko, 2000.(c) Credit Line: Stedelijk Museum voor Actuele Kunst, Ghent
Luc Tuymans (né en 1958)
Tous les sujets d'At Random sont arbitraires et empruntés au flot d'images qui déferle en permanence sur nous. Une jambe de femme (dans The Leg [1994]), un coin de paysage vu à travers une fenêtre (dans Self-Portrait [1994])... Ces images peuvent paraître
insignifiantes et pourraient être oubliées aussitôt, si ce n'était qu'elles contiennent peut-être un secret.

Dans sa série Der Architekt dédiée à l'Holocauste, l'artiste traite le sujet récurrent dans son oeuvre d'une façon moins cryptique, mais ce n'est pas sûr que chez le spectateur, ce langage plus clair contribue à une meilleure intelligence des atrocités qui sont commises dans le monde. Ceci montre que les oeuvres de Tuymans portent en outre sur le fait que certains évènements se soustraient à toute tentative de rendu. Ces toiles, pour la plupart monochromes, établissent une corrélation visuelle entre l'idéal nazi de la pureté aryenne et la dépravation de leurs actes. Himmler (1998) s'inspire d'une photo officielle de l'officier SS Heinrich Himmler, chargé de la mise en oeuvre de la « solution finale ».
Son visage est cependant noirci et donc réduit à une tache sombre, impénétrable. Le titre de K.Z. (1998) est l'abréviation du mot allemand pour camp de concentration. Mais cette oeuvre est tout aussi trompeuse, car elle ne montre qu'une partie du camp spécialement conçue pour cacher aux yeux des inspecteurs étrangers les véritables conditions dans lesquelles vivaient les prisonniers.

Dans la série Mwana Kitoko : Beautiful White Man, Tuymans montre l'héritage de violence que son pays natal, la Belgique, a laissé derrière elle en 1960, après 52 ans de colonisation. Ces oeuvres portent sur la situation postcoloniale dans la République Démocratique du Congo et les obscurs réseaux de pouvoir liés à l'assassinat de Patrice Lumumba, le premier Premier ministre démocratiquement élu du pays. The Mission (2000) représente l'endroit où aussi bien Lumumba que son rival politique Joseph-Désiré Mobutu ont reçu leur éducation. Chalk (2000) se réfère à une histoire que Tuymans a entendue à propos d'un officier de police qui aurait arraché deux dents à Lumumba
après sa mort. Dans Sculpture (2000), l'artiste transpose cette page d'histoire au présent, en représentant une sculpture en bois polychrome grandeur nature, une relique de l'ère coloniale, qu'il a découverte un jour par hasard dans un restaurant anversois.

Aux cimaises de cette exposition rétrospective figurent également des oeuvres « post-9/11 » faisant partie de sa série Proper, dont son fameux portrait de la Secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice (2005). En faisant un gros plan sur la société américaine et l'administration Bush, Proper montre le regard que l'artiste porte sur un pays qui a du mal à se redresser et en même temps s'accroche au décorum pour donner au monde une image de puissance et de normalité. Ballroom Dancing (2005) illustre le nouvel engouement pour la danse de salon en déclinant les charmes d'une parade et d'une romance à l'ancienne dans une toile s'inspirant d'une photo du Bal du gouverneur du
Texas. Peint sous un angle qui fait penser à celui d'une caméra de surveillance, The Parc (2005) montre comment les instruments de surveillance ont fait intrusion dans notre vie de tous les jours.

Et enfin, l'exposition comprend également des oeuvres de la série Der diagnostische Blick qui s'inspire de planches que Tuymans a trouvées dans un guide médical allemand des symptômes physiques de diverses maladies et affections. À travers ces oeuvres, l'artiste attire l'attention sur la peinture en tant que média en exacerbant le champ de tension entre le côté artisanal de celle-ci et l'oeil mécanique de l'appareil photo.

Des compilations de films réalisées par Tuymans pendant la période 1980-1985 seront projetées en exclusivité lors de l'exposition à Bruxelles. En 1980, Luc Tuymans arrêta la peinture pour se lancer dans la réalisation de films. Pendant cette période, il s'essaya aux formats de films super 8, super 16 et 35mm, jusqu'en 1985, lorsqu'il renoua avec la peinture. Ces fragments montrent déjà un avant-goût de l'imagerie qu'on retrouvera plus tard dans les peintures de l'artiste.

Dans toutes ces oeuvres, Tuymans s'attache à montrer « l'inmontrable » pour rendre les gens conscients de leur rôle de spectateurs et parfois, involontairement, de complices de l'histoire.

Commissariat d'exposition : Madeleine Grynsztejn, Pritzker Director of the Museum of Contemporary Art, Chicago (et ancienne SFMOMA Elise S. Haas Senior Curator of Painting and Sculpture), et Helen Molesworth, Chief Curator at the Institute of Contemporary Art in Boston (et ancienne Chief Curator of Exhibitions at the Wexner Center for the Arts).

Informations pratiques:
Luc Tuymans : Retrospective

 BOZAR au Palais des Beaux-Arts : Rue Ravenstein 23 - 1000 Bruxelles

 Heures d'ouverture : du mardi au dimanche, 10:00 - 18:00. Jeudi, 10:00 - 21:00. Fermé le lundi.

 Tickets € 10,00 (réductions sur www.bozar.be)

 Catalogue d'exposition "Rétrospective, Luc Tuymans", éd. Le Ludion

Luc Tuymans,

Reconstruction, 2000, oil on canvas, (c) Friedrich Christian Flick Collection


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